Quatre comédiens accompagnés d’une contrebasse donnent leur corps et leur voix, offrent leur art, au texte bouleversant de Jean Hatzfelf sur les massacres de 1994 au Rwanda, dans la mise en scène sensible et pudique de Dominique Lurcel. Pendant 1 heure 25 de spectacle, on entend ces hommes et ces femmes raconter l’horreur. Ils semblent sans états d’âme. Les élèves et moi sommes sous le choc. Tout semble pour eux banal, sans conséquences. Ce sont des Hutus cultivateurs,instituteurs, fonctionnaires ou religieux qui vivent sur les collines autour de la ville de Nyamata. Dans leur vie ordinaire, rien ne laissait présager cette plongée dans les abîmes du mal, ce devenir monstrueux de tueurs froids et sanguins.
Que s’est-il passé ? Qu’est-ce qui les a conduits à massacrer leurs collègues, voisins et amis Tutsis ? Nos schémas mentaux sont toujours prompts à percevoir dans les crimes d’une singulière barbarie le fait du « monstre ». Il se peut néanmoins que la réalité ne corresponde guère à cette représentation qui a le mérite d’être rassurante à défaut d’être entièrement vraie. Le texte de Jean Hatzfleld et la mise en scène de Dominique Lurcel nous mettent devant nos images toutes faites du mal, devant leur « naïveté » comme devant leurs limites.
